Tissus -Activité de prélèvement, de greffe de cornée et d’inscription en attente de greffe

La cornée est le seul tissu pour lequel l’inscription sur liste d’attente d’un patient candidat à la greffe est effective. Cette inscription se fait par enregistrement du patient sur la base de données informatique GLAC. Ce dispositif couplé aux données du prélèvement, enregistrées sur la base de données informatique CRISTAL et au Rapport Annuel des banques de tissus, permet une vision assez fine de l’ensemble de l’activité.

Le rapport d’activité cornées 2018 de l’Agence de la biomédecine est issu des données d’activité collectées auprès des 16 banques de cornées nationales, auprès de 190 des établissements de santé autorisés ayant réalisé des prélèvements de cornées, et auprès des 120 équipes d’ophtalmologie ayant déclaré des greffes.
 

En 2018 :
190 établissements de santé autorisés réalisent une activité de prélèvement de cornées. 5599 donneurs ont été à l’origine de 11145 cornées prélevées en 2018.

16 banques de tissus sont autorisées pour les activités de préparation, conservation et distribution de cornées. Elles ont distribué 5448 cornées pour greffe.

120 équipes d’ophtalmologie déclarent une activité de greffe, parmi elles, 27 équipes réalisent 75% de l’activité. Elles déclarent la réalisation de 4812 actes de greffes pour 4437 patients greffés.

On dispose grâce au rapport d’activité des banques et aux données des équipes d’ophtalmologie dans GLAC de deux sources d’informations pour les receveurs de cornées. 
Les résultats sont discordants :

• on observe une différence de 961 entre le nombre de receveurs déclarés dans le rapport annuel des banques (n_total=5398)  et dans GLAC (n_total NEFG=4437)
• on observe une différence de 636 entre le nombre de tissus distribués par les banques (n_total =5448) et le nombre d’actes de greffe enregistrés dans GLAC (n_total NATT = 4812)

L’indication principale de greffe de cornée qu’est la dystrophie de Fuchs augmente chaque année, elle représente 29,8% des indications parmi les inscrits et ce pourcentage a augmenté de 11,5% en 5 ans. Les autres indications de greffe restent relativement stables en nombre absolu. 

Depuis 3 ans l’Agence montre au travers de ce rapport que les besoins en cornées augmentent dans des proportions plus importantes que l’activité de prélèvement de cornée. Ce constat est particulièrement marqué en 2018 où le nombre de prélèvement a diminué et 24 cornées ont été importées.

• en nombre de donneurs : 5599 soit  -2,4% comparé à l’an dernier, +11,9% en 5 ans (Tableau Co1)
• en nombre de cornées distribuées : 5448 : -0,6% par rapport à l’an dernier, +23% en 5 ans
• en nombre d’actes de greffes : 4812 (-5,3% comparé à l’an dernier et +18,6% en 5 ans)
• en nombre de candidats à la greffe : 9610 en 2018 dont 6097 nouveaux inscrits : (-3,8% comparé à l’an dernier et +23,6% en 5 ans) et 3761 restant en liste d’attente en fin d’année : (+7,1% comparé à l’an dernier et +44,9% en 5 ans)
  (Tableau Co 7)

Le Tableau Co9 nous renseigne sur les indicateurs de l’activité qui confirment la tension dans les besoins : Le nombre de nouveaux inscrits par million d’habitant a progressé de 21,5 % en 5 ans, 
le nombre de patients restant en attente en fin d’année a augmenté de 42,4% tandis que 
le nombre de greffes par million d’habitants a augmenté de 16%.

Ainsi le taux de greffe (nombre de patients inscrits et greffés la même année) a diminué de 7% en 5 ans au niveau national.

Parallèlement le nombre de cornées prélevées par million d’habitants a progressé, mais moins vite, de 10% en 5 ans.

Il y a donc plus de candidats à la greffe chaque année et cette augmentation est plus rapide que celle du nombre de greffes réalisées. Progressivement le nombre de patients en attente à l’instant t augmente. 

L’ensemble de ces indicateurs doit nous alerter : les besoins en cornées augmentent. 
Si la France a réussi depuis plusieurs années à revendiquer sur ce seul tissu une relative autosuffisance, ce message n’est plus d’actualité.
 

La cornée est le tissu le plus prélevé sur donneur décédé : 95% des donneurs de tissus sont des donneurs de cornées. 
5 599 donneurs ont été prélevés de cornées en 2018 et ont donné 11 145 cornées (Tableau Co1). 

84% des donneurs de cornées sont des donneurs de tissus seuls (DTS) : il s’agit des donneurs décédés en arrêt hémodynamique. Ces donneurs sont prélevés en chambre mortuaire principalement, jusque dans les 24h suivant leur décès. 

16% des donneurs de cornées sont des donneurs d’organes et de tissus (DDAC - MI-II / M III et SME) : donneurs décédés pour lesquels un prélèvement d’organe est possible. Ces donneurs sont prélevés au bloc opératoire des urgences principalement (Tableau Co2). 
 

Il faut noter, en outre, la différence des taux de cornées greffées en fonction du type de donneur duquel elles proviennent : 47% des cornées prélevées sur donneurs de tissus seuls seront greffées, comparé à 56% lorsqu’elles proviennent de prélèvement d’organe. 

Cette donnée doit encourager toute action au prélèvement qui viserait à 

• raccourcir les délais entre l’arrêt circulatoire et le prélèvement des échantillons sanguins pour diminuer les risques de résultats de sérologies ininterprétables, 
• améliorer les conditions environnementales et de conservation des corps dans l’attente du prélèvement pour diminuer tout risque de contamination et de dégradation de la qualité du tissu.

11145 cornées ont été prélevées en 2018 (source CRISTAL). On note la très bonne corrélation des données de prélèvement avec celles des cornées réceptionnées en banque de tissus : 11133. Une différence de seulement 12 cornées (0,1%) est observée entre les 2 sources de données. La cornée est un tissu qui se conserve en organoculture pour une durée maximale de 30 jours, les interventions de greffe sont programmées aux périodes ouvrées et soumises aux contraintes des périodes de congés ce qui explique qu’à certaines périodes des cornées en excédent peuvent être exportées et qu’à d’autres périodes un manque de cornées disponibles explique le recours à l’importation (Tableaux Co1 et Co3).

En matière de cornées, les volumes d’activité des 16 banques de tissus sont très différents, leurs activités globales en 2018 cumulant les entrées de cornées : issues du prélèvement et reçues d’une autre banque française ou étrangère, et les sorties, cumulant les distributions à des équipes de greffe, les envois à d’autres banques de tissus française ou les exports, sont rapportés dans le tableau Co4.

En 2018, le taux d’élimination des cornées diminue et passe à 49%, soit -1,5% par rapport à l’an dernier, et -4,1% en 5 ans.
Les banques de tissus ont pour rôle de qualifier les tissus pour greffe.
Elles doivent éliminer tout tissu qui ne satisfait pas aux exigences de qualité et de sécurité sanitaire. 

Ce taux se décompose ainsi : 
1,2% des cornées prélevées qui sont non qualifiées en banque de tissus en raison de contre-indications médicales apparaissant après le prélèvement ; 
8,6% en raison de non-conformités des examens de recherche des marqueurs d’infection virologiques et syphilitiques, 
5,6% en raison de contamination bactériologique et fongiques de cornées prélevées, 
31,1% des cornées présentant une mauvaise qualité tissulaire les rendant impropres à la greffe (nombre de cellules endothéliales insuffisant, défaut de transparence, nombre de cellules mortes trop important, mauvaise découpe). 
A noter que 1,5% des cornées prélevées sont périmées (n=167) et 10,8% (n=88) sont éliminées pour d’autres causes, dont celle des cornées distribuées aux équipes mais non greffées en raison de problèmes de découpes de greffons (Tableau Co6).
 

Le nombre précis de greffes de cornées n’est pas consolidé, il est compris entre 4812(source GLAC) et 5448 (source rapport d’activité des banques de tissus) (Tableau Co7) 

Les banques de tissus déclarent 5 448 cornées distribuées pour ces greffes (Tableau Co5). Si on en considère 158 cornées exportées (Tableau Co3) qu’on ne retrouve pas dans GLAC (non obligatoire hors des frontières) et 88 éliminées « autres » correspondant souvent aux cornées distribuées non greffées pour des raisons de problème de découpe de contamination ou liés au receveur (Tableau Co6), on peut considérer que 5448-158-88 = 5202 greffes auraient dû être déclarées dans GLAC. Comparé au chiffre existant de 4812, un écart de 390 cornées est mal enregistré.

En 2018, le nombre de nouveaux patients inscrits en liste d’attente de greffe de cornée diminue cette année et passe à 6 097 (-239 par rapport à l’an dernier) (Tableau Co7). Il a augmenté de 24% en 5 ans, alors qu’en parallèle le nombre de greffes a augmenté de 19%. Ces chiffres confirment la nette augmentation des besoins en cornées observée depuis 5 ans et doivent motiver les acteurs à maintenir l’effort au prélèvement. 

Ce nombre de nouveaux inscrits doit être pondéré par la part annuelle moyenne des patients sortis de liste. En 2018, 1037 (+29) patients sortis de liste représentent 11% de la liste des candidats à la greffe (nouveaux inscrits de l’année + patients en attente au 1er janvier de l’année (n=9610), proportion constante depuis 5 ans (Tableau Co7).

La figure Co2 montre que parmi les 6097 patients inscrits en 2018, 3932 ont été greffés dans l’année et 1994 patients restent sur liste en attente de greffe, 
Parmi les patients inscrits en 2017, 815 restent à greffer au 13 mars 2019 (Figure Co2). 

Le Tableau Co8 évalue plus précisément le délai entre l’inscription sur liste et la greffe de cornée.
29,1% (-3,8%) des patients sont greffés dans le mois suivant leur inscription. 

A l’issue d’une période de 2 ans d’inscription sur liste sans greffe déclarée, il est effectué une désinscription systématique de la liste d’attente après information du patient et de son équipe de greffe.
 

Le prélèvement de cornées en France a atteint en 2018 le chiffre de 11 145 cornées prélevées (-280 par rapport à l’an dernier) (Figure Co1) et représente au niveau national un taux de 166,3 cornées prélevées par million d’habitants (+15.4 cornées prélevées pmh depuis 2013) (Tableau Co9). 

Le taux de cornées greffées, qui traduit l’accès à la greffe en France en 2018, diminue depuis 5 ans, il atteint 55,5% ; tandis que le taux de nouveaux inscrits, traduisant les besoins, est de 91 pmh (Tableau Co9).
Il faut toutefois noter que ces besoins sont probablement surestimés de 10% considérant le nombre de patients sortis de liste (n=1037) rapportés au nombre total des candidats chaque année (n=9610) composé des nouveaux inscrits (n=6097) et des patients en attente au 01/01 (n=3513).

L’ensemble de ces données doit nous amener à modérer tout discours d’autosuffisance sur l’activité cornée. 
De nombreuses cornées prélevées ne peuvent être qualifiées pour la greffe en raison de non-conformités survenant lors des différentes étapes du prélèvement et de la conservation. Des disparités régionales subsistent en termes de besoins et d’accès à la greffe. Les besoins augmentent et l’activité reste en flux tendu. A certaines périodes de l’année, les excédents conduisent à des exportations et/ou des péremptions. Ainsi même dans les régions où prélèvement, greffe et inscription s’équilibrent au long de l’année, les périodes de pénurie et d’excédent ne font pas exception. C’est le challenge de demain que d’identifier les solutions d’adaptation de l’offre aux besoins et de favoriser les échanges inter-banques.

L’évolution des indications de greffe depuis 5 ans est représentée dans le Tableau Co10. La part des inscrits dans le cas des indications pour kératocône (11,4%) diminue d’année en année, mais reste sensiblement le même en valeur absolue ; celle pour décompensation endothéliale primitive (31,0%) ne cesse d’augmenter : elles concernent en 2018 1895 patients. Les greffes itératives de cornées dans les cas d’échecs de greffe représentent 14% des indications, proportion stable depuis 5 ans.

71% des greffes de cornées en 2018 sont réalisées dans des établissements de santé publics (55% CHRU, 16% CH), 29 % dans des établissements privés, cette proportion reste stable au cours du temps (Tableau Co11). 

En 2018, 152 équipes d’ophtalmologie sont enregistrées dans GLAC (-5 par rapport à l’an dernier) (Tableau Co12). La règle de fermeture d’une équipe en cas de toute inactivité sur GLAC en matière d’inscription de patients, et de déclaration de greffe pendant 2 ans consécutifs  a conduit depuis 2016 à la fermeture des accès à GLAC de 118 équipes.

Certaines équipes déclarent des greffes mais n’ont aucun patient inscrit sur liste au 31/12. En 2018, elles sont au nombre de 12, une d’elles ayant réalisé 149 greffes en 2018 ; 

Certaines équipes ont des patients inscrits sur leur liste mais ne déclarent aucune activité de greffe ; elles sont 32 en 2018 et ont encore 191 patients en attente.

Comme toute greffe, la greffe de cornée est matière d’expérience, et il faut noter que parmi les 120 équipes ayant déclaré des greffes en 2018 (-2 par rapport à l’an dernier), 38 (-6) déclarent moins de 5 greffes de cornées sur l’année, et parmi elles 18 n’en déclarent qu’une dans l’année, ce qui est très certainement trop peu pour maîtriser correctement l’activité. Ces 38 équipes totalisent 52 greffes et au 31/12 de l’année, 187 patients restent inscrits sur leur liste.

En 2019, l’agence réunit un groupe de travail ophtalmologie dont un des objectifs est une meilleure définition du bon usage de GLAC pour une vision plus fine des besoins.